Toucher son visage à l’époque du COVID19 en Iran. Journal Américain de Contrôle des Infections.

Publié par Dr sc Olivier Dufour le

Traduction en français de l’article scientifique à comité de lecture suivant:
Shiraly, R., Shayan, Z., & McLaws, M. L. (2020). Face touching in the time of COVID-19 in Shiraz, Iran. American journal of infection control.
https://dx.doi.org/10.1016%2Fj.ajic.2020.08.009

Toucher son visage à l’époque du COVID19 en Iran. Journal Américain de Contrôle des Infections.

Bonjour.
Je suis le Dr Olivier Dufour .
Il y a quelques jours, nous avons traduit et lu un article intitulé « Se toucher le visage: une habitude fréquente qui a des conséquences sur l’hygiène des mains ».
J’ai informé de notre initiative l’auteur de correspondance de cette expérience scientifique.
En moins de 24 heures, la professeure Mary-Louise McLaws m’a répondu.
Elle nous remercie du temps que nous avons pris pour traduire l’article de son équipe.
Et elle nous aiguille vers un autre article qu’elle vient de copublier.
Attention, je suis spécialisé dans des domaines de recherche différents de ceux en jeu dans le présent article.
Outre mes fautes d’étourderies, je ne connais pas le vocabulaire anglais technique propre à ce domaine.
Si vous appartenez au dit domaine, et que vous avez des remarques constructives à me signaler, merci de m’envoyer un mail à l’adresse indiquée dans le présent document.
Comme d’habitude, vous trouverez le fichier pdf sourcé de la traduction de l’article dans la description sous la vidéo.
Date de fin de la traduction: 16 novembre 2020.
Contexte.
Le SARS-CoV-2 s’est propagé rapidement affectant plus de 10,4 millions de citoyens du monde.
Et sa facilité de propagation a été démontrée par le grand tourment qu’il a généré partout dans le monde.
Deux caractéristiques du virus permettent de comprendre l’efficacité de la transmission: (1) la transmission directe pendant les périodes présymptomatiques et symptomatiques et (2) la transmission indirecte de particules virales sur des surfaces fréquemment touchées .
La principale méthode de transmission communautaire a été assignée à l’exposition directe aux gouttelettes respiratoires suivie de l’auto-inoculation du virus au sein de la muqueuse faciale après avoir touché des surfaces contaminées et des fomites.
[Note du traducteur: Définition wikipédia de « fomite »: Un fomite ou vecteur passif de transmission d’une maladie est, chez les anglophones surtout, un objet « contaminé » par des organismes pathogènes, quand cet objet est susceptible de propager une infection d’un individu à un autre lors du phénomène de contagion. Il ne préjuge pas du type d’agent infectieux incriminé.]
Le toucher du visage est pratiqué par les humains pour plusieurs raisons hypothétiques qui incluent l’autorégulation des émotions et pour transmettre des messages non verbaux .
La fréquence des comportements de toucher du visage dans le public a été évaluée chez des étudiants en médecine australiens en première année à l’université sur un total de 240 minutes de conférence. Les touchers du visage s’y sont produit en moyenne 23 fois par heure. 11 (44%) sur des zones muqueuses du visage: la bouche (36%), le nez (31%), et les yeux (27%) .
Une autre étude a estimé que le toucher moyen du visage était de 16 fois par heure sur 10 étudiants observés effectuant un travail de bureau .
Il a été conseillé au public de se protéger du COVID-19 en se distanciant physiquement, en ayant une bonne hygiène des mains et en s’abstenant de se toucher le visage.
Le but de notre étude était d’établir la fréquence des comportements de contact avec le visage du public après la levée des restrictions de quarantaine à Shiraz, en Iran.
Méthode.
Conception de l’étude et participants.
Le gouvernement iranien a commencé à lever les restrictions de quarantaine à partir du 20 avril 2020 et des observations de toucher du visage dans la communauté en général ont été menées entre le 22 avril et le 9 mai 2020.
La communauté en général a été observée là où la distance physique était nécessaire, y compris dans les parcs publics, les cliniques externes, les banques et les gares routières à Shiraz, dans le sud de l’Iran.
A été utilisé un échantillon composé seulement d’adultes qui pouvait être observés pendant au moins 15 minutes en public et qui n’utilisaient pas de téléphone portable.
Les écoliers ont été exclus car ils n’était pas censés percevoir le risque de pandémie de COVID-19.
Collecte de données.
Chaque personne a été observée à une distance de plusieurs mètres par un observateur qualifié qui n’a établi aucun contact avec les participants.
Le temps d’observation de chaque personne variait de 15 à 30 minutes.
Les observateurs ont évalué l’âge des personnes observées (jeunes, d’âge moyen, aînés), leur sexe (hommes, femmes) et si elles portaient un masque facial avec ou sans gants ou pas de masque.
Les touchers du visage étaient catégorisés en 2 zones.
La zone muqueuse comprenait les yeux, le nez, la bouche. Et toutes les autres zones étaient classées comme non muqueuses.
Les observateurs ont utilisé une liste de vérifications pour enregistrer le nombre de fois où chaque personne observée a touché sa zone faciale, son masque et la durée de l’observation.
Analyses statistiques.
Le nombre total de touchers sur les zones muqueuses et non muqueuses a été additionné et divisé par la durée des observations pour obtenir un nombre moyen par heure.
La moyenne et l’écart type ont été calculés pour les personnes portant un masque, avec ou sans gants, et pour les personnes sans masque.
Nous avons cherché des différences significatives entre ces moyennes et écarts-type en utilisant l’ANOVA.
La probabilité de toucher la zone muqueuse a été évaluée en fonction de l’âge, du sexe, du port de lunettes et du port du masque à l’aide d’une analyse régressive séquentielle pour établir le rapport de cotes avec des intervalles de confiance avec un niveau de signification fixé à 5%.
[Note du traducteur: Définition wikipédia de « rapport de cotes »: Le rapport de cotes également appelé rapport des chances ou risque relatif rapproché, est une mesure statistique, souvent utilisée en épidémiologie, exprimant le degré de dépendance entre des variables aléatoires qualitatives.]
La version 19 de SPSS (IBM, États-Unis) a été utilisée pour toutes les analyses statistiques.
Résultats.
Un total de 1000 personnes a été observé dans des parcs publics (350/1 000, 35%), des banques (370/1 000, 37%), des cliniques externes (260/1 000, 26%) et des gares routières (20/1 000, 2%).
Un peu plus de la moitié (530/1 000, 53%) étaient des hommes. Et les observateurs ont estimé que la proportion de personnes observées comprenait 44% (440/1 000) de jeunes, 37% (370/1 000) d’âge moyen et 19% (190/1 000) d’ainés.
Un peu plus de la moitié (57%, 568/1 000) portaient un masque.
La majorité (92%) des 1 000 personnes observées s’est touché au moins 1 fois le visage et effectué en moyenne 10 (écart-type = 6) touchers du visage par heure.
Des touchers du visage significativement plus nombreux, quelle que soit la zone, ont été observés chez les personnes sans masque (11 par heure, écart-type 6) par rapport à celles portant un masque (8 par heure, écart-type 5) (P <.001).
Les personnes sans masque ont touché leur zone muqueuse plus fréquemment que les porteurs de masques (5,5 contre 1,9 fois par heure, P <0,001).
Près de la moitié (47%) des touchers au visage pratiqués par des personnes porteuses de masques sur elles-mêmes, étaient pratiqués justement sur le masque.
De plus, la non utilisation du masque était un prédicteur significatif de toucher du visage au niveau de la zone muqueuse; avec des porteurs non masqués 1,5 fois (Intervalle de confiance à 95%; rapport de cotes entre 1,2 et 2,0 ; P <0,001) plus susceptibles de toucher leur zone muqueuse par rapport aux porteurs de masque.
Discussion.
Après que l’Iran ait levé les restrictions, notre observation du toucher du visage chez 1 000 Iraniens soutient la suggestion que ce comportement est courant.
Cependant, le nombre de touchers du visage par heure chez les iraniens observés était inférieur de 37% à 56%, 10 fois par heure pendant l’observation directe, aux fréquences mesurées dans 2 populations étudiantes avant COVID-19 (6 à 13 touchers en moins par heure respectivement).
Dans 2 études américaines qui ont rapporté des observations directes de toucher du visage, la fréquence moyenne était de 9 et 62 fois par heure .
Dans 2 autres études aux États-Unis et au Japon , utilisant des enregistrements vidéos, les moyennes étaient de 16 et 18 fois par heure respectivement.
Ces chiffres peuvent être impactés par les méthodes d’observation.
Puisque nous ne disposons pas d’observations, avant le COVID-19, du toucher du visage en Iran, il n’est pas possible de faire de comparaison. Et donc, il n’est pas possible de suggérer que les messages de santé publique sur les dangers potentiels du toucher du visage ont entraîné moins de touchers du visage.
Certes, nous avons observé que seulement la moitié de tous les Iraniens portaient un masque, le port du masque n’étant pas une norme culturelle avant le COVID-19.
L’utilisation d’un masque était associée à un nombre significativement moins élevé de touchers du visage et moins de touchers de zones muqueuses que les non-porteurs de masque.
Il existe 2 études d’une puissance remarquable qui ont rapporté des niveaux de protection similaires pour le Syndrome Respiratoire Aigu Soudain (SRAS), rapport de cotes = 0,3 (intervalle de confiance à 95%; rapport de cotes entre 0,12 et 0,73) et rapport de cotes = 0,32 (intervalle de confiance à 95%; rapport de cotes entre 0,17 et 0,61).
Les preuves du caractère protecteur des masques en tissu et de qualité non médicale portés par le public après l’épidémie de SRAS ont été limitées en raison de divers biais de conception.
Pourtant, l’utilisation de masques en tissu publics est devenue obligatoire dans certains pays et associée à d’autres stratégies de prévention du COVID-19 .
L’Organisation Mondiale de la Santé a mis à jour les lignes directrices concernant les masques, qui clarifient l’utilisation de masques en tissu et de qualité non médicale pour la protection du public là où la distance physique est impossible, comme dans les transports en commun, dans les espaces publics et sur les lieux de travail.
La construction des masques en tissu nécessitait désormais 3 couches pour améliorer l’efficacité de la filtration .
L’utilisation d’un masque peut réduire la transmission d’infections virales graves, car les non-porteurs de masque étaient 1,5 fois plus susceptibles de toucher leur zone muqueuse.
[Note du traducteur. Je me sens obligé de préciser, que les zones muqueuses, ce sont des portes d’entrée vers l’intérieur du corps humain. C’est pour ça que les auteurs font ici une distinction entre zone muqueuse et zone non muqueuse. Une zone muqueuse est une zone par laquelle un pathogène de l’environnement extérieur, risque fortement d’entrer directement à l’intérieur des tissus humains.]
Le toucher du masque représentait 47% de tous les touchers effectués par les porteurs de masque et cela peut être réduit avec un meilleur ajustement et des masques améliorés.
Le masque porté par les agents de santé pendant plus de 6 heures a été associé à une contamination du masque par des virus respiratoires .
Mais l’inquiétude concernant la contamination du public par le SARS-CoV-2 sur la surface externe des masques peut être sans fondement.
Sur les 90 équipements, y compris les respirateurs, de protection individuelle échantillonnés pour le SARS-CoV-2 auprès de 30 agents de santé prenant en charge jusqu’à 10 minutes de patients positifs, tous les échantillons ont été testés négatifs .
Comme pour toute étude d’observation, notre étude comporte des limites.
Pour réduire tout effet Hawthorne, les participants n’ont pas été contactés avant d’être observés mais nous n’avons pas pu normaliser la durée des observations.
Et nous avons fait le compromis de choisir 15 minutes comme période minimale.
[Note du traducteur: Définition wikipédia de l’effet Hawthorne. L’effet Hawthorne décrit la situation dans laquelle les résultats d’une expérience ne sont pas dus aux facteurs expérimentaux mais au fait que les sujets ont conscience de participer à une expérience dans laquelle ils sont testés, ce qui se traduit généralement par une plus grande motivation.]
Cette étude a été menée dans les premiers jours après la levée des restrictions de quarantaine en Iran.
Bien que la quarantaine n’ait pas été strictement appliquée en Iran, une réticence à fréquenter les lieux publics a été observée.
Par conséquent, la population observée peut ne pas être une véritable représentation de la société iranienne.
Nous n’avons trouvé aucune donnée communautaire sur le toucher du visage avant la pandémie pour comparer notre observation.
Nous ne nous attendons pas à ce que nos résultats soient généralisables aux milieux de soins de santé, en raison de la période prolongée de port et du type de masque exigé des agents de santé.
Le toucher du visage est un comportement complexe qui est affecté par de nombreuses influences cognitives et émotionnelles .
Nous n’avons pas pu évaluer les facteurs influençant le toucher du visage, mais nous nous attendons à ce que la sensibilisation au COVID-19 ait pu réduire cette pratique.
Conclusion.
Les masques peuvent réduire indirectement le risque de COVID-19 grâce à son action mécanique mais aussi en tant que mécanisme pour empêcher le toucher en particulier de 2 des 3 zones muqueuses du visage.

Fichier pdf de l’article traduit avec toutes les sources et références bibliographiques.
https://drive.google.com/file/d/1ecklnYRhKWxuSzEKo9XMg-DehynnnHJL/view?usp=sharing

00:00 Début
01:11 Introduction
03:28 Méthode
06:32 Résultats
08:36 Discussion
14:23 Conclusion

Playlist de toutes mes lectures d’articles scientifiques anglais traduits en français:
https://www.youtube.com/playlist?list=PLOQanq3p4_Clc1XMv80x0oJaHc_GgMRo2

F A C E B O O K
https://www.facebook.com/Science-Dr-Dufour-Olivier-2316438282013527/

T W I T T E R
https://twitter.com/dufour_dr

Je suis le Docteur Olivier Dufour. (Montpellier)
Références personnelles et mon profil:

Références de mon sujet de thèse:
https://www.theses.fr/2016LARE0005

Un peu de biblio perso:
https://www.researchgate.net/profile/Olivier_Dufour2
https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=XGOfDwAAQBAJ&oi=fnd&pg=PA83&dq=olivier+dufour&ots=7gTOW4reSH&sig=Ux_G5gM3DgOAvTjX1IniIQR2Gko#v=onepage&q=olivier%20dufour&f=false
https://cel.archives-ouvertes.fr/LIP6/hal-01488785v1
https://hal-amu.archives-ouvertes.fr/hal-01488264/
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1574954116301194
https://doi.org/10.1016/j.ecoinf.2016.08.004

Les articles que j’ai reviewés pour la revue scientifique à comité de lecture « Ecological informatics »:
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1574954116301261
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1574954117300286
https://arxiv.org/abs/1909.04425
https://cel.archives-ouvertes.fr/LIP6/hal-01488786v1


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